Fatigué, approximatif mais décisif

Cliquez pour agrandir l'image lundi 29 avril 2013

Magnus Carlsen est un redoutable joueur de finales. Comme l'a écrit le Grand-Maître Jonathan Speelman dans son excellent article paru dans le premier numéro de l'année 2013 du magazine New in Chess, il est craint par ses pairs dans cette phase de jeu très technique. Son endurance, sa précision et sa capacité à ne commettre que des erreurs mineures font merveilles à ce stade de la partie ou la fatigue diminue la vigilance de ses adversaires.

Lors du tournoi des candidats de Londres qui lui a permis de devenir le prochain challenger du champion du monde, il a reconnu que son jeu s'était détérioré lors des trois dernières rondes au cours desquelles il a subi deux défaites. Il a évoqué son état de fatigue pour justifier cette baisse de régime. Bien qu'ayant gagné lors de la dixième ronde contre Boris Gelfand, nous allons voir que sa technique pour concrétiser un avantage décisif a été très approximative. Sa grande force en finale était sans doute déjà amoindrie.

Cette partie est analysée dans le numéro du mois de mai du magazine Europe Echecs par Peter Heine Nielsen. Lors de ce tournoi, le Grand-Maître danois aidait le jeune Norvégien en tant que secondant. Il est toujours très intéressant de lire les commentaires des personnes directement impliquées dans la compétition, que ce soient les joueurs ou leurs entraîneurs.

Comme il l'a reconnu avec beaucoup de franchise après la partie et comme le précise Nielsen dans son analyse, le numéro 1 mondial n'a pas vu un important coup de son adversaire dans une finale qui semblait pourtant relativement facile à gagner. Assistant à la fin de cette dixième ronde sur internet, j'ai naïvement cru que le Norvégien avait brillamment calculé le sacrifice de son Fou jusqu'au gain. Admiratifs devant la précision de ces champions, nous avons parfois tendance à surestimer leurs capacités. Nielsen prétend que cet oubli fût sans conséquence sur le résultat de la partie. Son analyse est trop sommaire pour être totalement convaincante. J'ai donc mis mon ouvrage sur le métier pour compléter l'analyse du Danois.



Cette finale alimentera la nombreuse collection de parties sur le thème "je n'ai pas tout vu mais je gagne quand même".

Si le joueur d'échecs ne peut pas tout calculer (c'est souvent contre-productif d'un point de vue pratique), il est important qu'il anticipe le contre-jeu de l'adversaire. Cela demande une concentration de tous les instants. Sur ce plan, ce jour là, Carlsen a failli.

Pourtant, le nouveau challenger considère cette partie comme la plus aboutie de son tournoi. Selon ses propres mots reproduits dans Europe Echecs : "Ma partie de la ronde 10 contre Boris Gelfand symbolise à mes yeux le niveau de jeu auquel j'aspirais durant ce tournoi des candidats". C'est sans doute vrai pour ce qui concerne le traitement de l'ouverture et du milieu de jeu. Par contre, la réalisation technique en finale ne fût pas de la même qualité.

La photographie de Magnus Carlsen qui illustre ce billet est de Ray Morris-Hill.
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