Un cycle de qualification plus simple

lundi 9 mars 2020

Le champion du monde en cadence classique est le principal représentant du monde des échecs auprès des médias. Les noms de Kasparov, Karpov ou Fischer sont connus du grand public. Le système de désignation du champion doit naturellement faire émerger le meilleur joueur qui devient ainsi une figure incontestable, digne d'être le porte drapeau de notre sport. Un système qui désigne un champion différent chaque année au terme d'une compétition aléatoire comme il en existe dans d'autres sports est inadapté car il conduit au couronnement de joueurs, qui malgré leur qualité, s'évanouissent dans un relatif anonymat hors du cercle restreint des passionnés de l'histoire de notre jeu.

La désignation du champion au terme d'un match opposant le tenant du titre à son challenger va dans le sens de la stabilité puisqu'il est difficile de détrôner le monarque qui jouit du privilège d'être automatiquement qualifié pour la confrontation finale. Son challenger doit surmonter un parcours semé d'embûches. En cela, il prouve qu'il possède le potentiel pour vaincre le champion. Même si l'avantage accordé au tenant du titre peut sembler exorbitant au regard de l'équité sportive, ce système est aisément compréhensible du grand public en assurant l'émergence d'une figure médiatique durablement identifiable.

Si le principe du match est acquis, le mode de qualification du challenger est sujet à contestation.

Le système actuel qualifie automatiquement le perdant du match pour le titre, les deux finalistes de la coupe du monde, les deux premiers du Grand Prix, le vainqueur d'un open de qualification, le meilleur selon la moyenne Elo calculée sur une période préalablement définie par la fédération internationale et un invité de l'organisateur soumis à certaines règle imposées par la fédération internationale. Si un joueur est déjà qualifié grâce à un autre critère, c'est le suivant qui accède à la qualification.

Ce système est peu compréhensible car trop complexe et conduit à des dérives. Certaines qualifications sont obtenues grâce à des parties rapides et à des blitz ou dépendent d'un système de départage lié aux résultats entre joueurs de bas de tableau. De plus, il n'est pas convenable d'octroyer une invitation dans un tournoi avec un aussi petit nombre de joueur. Dans un article publié dans le magazine New in Chess, Jan Timman a remarqué avec justesse que, si la désignation d'un joueur prestigieux était acceptable pour un tournoi à 16 joueurs (Boris Spassky à Montpellier en 1985), elle ne l'est pas pour un joueur peu connu dans un tournoi à seulement 8 joueurs (Kirill Alekseenko à Ekaterinbourg en 2020). Le système actuel doit donc être réformé.

Je préconise un système basé sur les parties en cadence classique et les confrontations sur l'échiquier. Il se décompose en tournois de qualification au système suisse, d'un tournoi des candidats pour désigner le challenger et d'un match pour le titre.

Le tenant du titre affrontera son challenger au cours d'un match relativement long (16 parties en cadence classique). En cas d'égalité, le tenant conservera le titre mais perdra le privilège de la qualification automatique pour le match suivant. Il devra donc se qualifier car il n'a pas prouvé sa supériorité sur son challenger. Les deux adversaires auront donc intérêt à éviter que la confrontation s'achève sur un match nul.

Le tournoi des candidats composé de 8 joueurs se jouera en double rondes (14 parties). Il désignera le challenger dans le cas ou le champion du monde a gagné le match précédent ou les deux protagonistes du match pour le titre dans le cas ou le champion a concédé le match nul.

Quatre tournois en cadence classique au système suisse désigneront chacun deux qualifiés pour le tournoi des candidats. Pour assurer l'homogénéité du niveau des participants, ces tournois seront réservés à des joueurs appartenant au top 100 mondial (un classement Elo supérieur à environ 2650). Le nombre de rondes doit être suffisant pour limiter les ex-aequo (11 rondes). En prenant pour exemple le tournoi qualificatif de l'Île de Man en 2019 joué sur 11 rondes, Wang Hao et Fabiano Caruana auraient été qualifiés pour le tournoi des candidats sans avoir recours aux départages. Un joueur déjà qualifié lors d'un tournoi précédent n'aura pas le droit de participer aux tournois suivants. Le champion en titre ne pourra participer que s'il est contraint de se qualifier après avoir concéder un match nul à son challenger. Le challenger malheureux n'aura pas le privilège d'être directement qualifié pour le tournoi des candidats et devra participer à ces tournois de qualification. Les joueurs qui ne seront pas qualifiés pourront tenter à nouveau leur chance lors du tournoi suivant. Le premier tournoi sera évidemment plus difficile que les suivants, notamment que le dernier qui exclu la participation des six joueurs qualifiés lors des trois premiers tournois.

En cas d'ex-aequo, un départage en cadence rapide (25 minutes + 10 secondes par coup) pourra être envisagé. En cas de nouvelle égalité, le joueur avec le meilleur départage à la fin du tournoi (Buchholz, performance Elo ou autre) sera désigné vainqueur. Le recours aux blitz de départage sera prohibé car cette cadence de jeu est trop différente de la cadence cible de la compétition.

Le système proposé permet aux joueurs appartenant à l'élite mondiale de tenter leur chance plusieurs fois, limitant les aléas d'une mauvaise performance ponctuelle. Il privilégie les confrontations sur l'échiquier en cadence classique. Il devrait favoriser les joueurs entreprenants car se contenter de neutraliser ses adversaires est insuffisant pour briller dans un tournoi au système suisse. Ces tournois de qualification qui seront certainement passionnants à suivre devraient allécher les organisateurs.

Ce système qui limite le mélange des cadences de jeu a l'avantage de la clarté et préserve l'équité sportive.

La simplicité n'est-elle pas la sophistication suprême comme l'affirmait en son temps Léonard de Vinci ?

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